dimanche 23 février 2014

Je suis interdite de Anouk Markovits (Roman)

Il s’agit d’une saga assez austère où l’on suit le destin de trois juifs élevés dans un courant fondamentaliste très strict : Joseph a vu ses parents et sa petite sœur tués devant ses yeux en 1939 en Transylvanie, Mila a aussi perdu ses parents pendant la guerre et a été recueillie chez les Stern à Paris. Elle sera élevée en même temps qu’Atara qui deviendra très vite comme une sœur pour elle. Joseph sera lui envoyé aux Etats-Unis pour vivre près du Rebbe (grand Rabbin du courant qu’ils suivent). Et l’on suit la petite histoire des personnages et l’Histoire avec un grand H car la fuite du Rebbe qui a réussi à rejoindre les Etats-Unis pendant la guerre est entachée de soupçons. Il aurait peut-être laissé beaucoup de juifs mourir pour sauver sa peau. Cela, on l’apprend petit à petit et dans le monde où Mila et Atara vivent, il est très difficile d’obtenir des informations car on ne peut pas lire les journaux, on ne peut pas regarder la télévision, écouter la radio. Il n’est d’ailleurs pas permis de communiquer avec qui que ce soit qui n’appartient pas à la communauté. Le mot « interdit » est un mot qui revient tout le temps et il y a une scène terrible quand après avoir fait du vélo un jour de Sabbat, Mila et Atara sont sévèrement réprimandées. L’une n’aura alors de cesse de questionner cette éducation où tout ou presque est interdit, l’autre ne la remettra pas en question.

C’est un livre qui nous fait découvrir un monde inconnu, qui nous permet d’effectuer une vraie plongée dans une communauté au mode de vie extrêmement éloigné du mode de vie occidental. Ce monde a un côté très oppressant pour qui connait la liberté de penser, de se mouvoir et la liberté d’expression. Lorsque l’une des deux amies souhaite étudier, on lui fait clairement comprendre que cela n’est pas de l’ordre du possible. Il est difficile de ne pas s’identifier à elle, à sa souffrance. On ne voit pas que les côtés négatifs de cette communauté, mais ses côtés négatifs sont si extrêmes qu’on a du mal à voir le positif. Il y a pourtant le travail, l’étude (de la religion uniquement), la solidarité familiale, mais ils sont écrasés par les « interdits ». Dans un tel contexte, les sentiments sont forcément exacerbés et les destins marqués, il est alors émouvant de suivre les personnages depuis leur plus jeune âge jusqu’au seuil de leur vie. C’est une saga captivante, par le monde qu’elle nous fait découvrir et l’enchevêtrement des histoires personnelles et de la grande histoire.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire