samedi 9 novembre 2013

La maison des absents de Tana French

Un enquêteur et son jeune adjoint se retrouvent affectés sur une grosse affaire : une famille est retrouvée assassinée chez elle : le père et les deux enfants sont morts, la mère est encore en vie mais dans un état critique.

Le couple apparemment sans histoires vivait dans une ville dortoir, montée à la va-vite en bord de mer et achetée lors du boom immobilier. Il se trouve que l’enquêteur principal passait ses vacances d’été là-bas avec sa famille. Histoires familiales et évolution de la société irlandaise se trouvent mêlés au cœur de l’intrigue. C’est que la société a évolué depuis les années 1970 : à l’époque, passer ses vacances dans une caravane près de la mer d’Irlande suffisait à beaucoup de gens alors que de nos jours c’est plutôt vacances sur la costa del sol en Espagne. La famille Spain ne déroge pas à la règle. Ils s’endettent pour devenir propriétaires de leur petit « coin de paradis » en bord de mer et font tourner à plein la société de consommation, mais lors de la crise financière, Pat Spain perd son emploi et quelques mois plus tard, c’est la tragédie.

Les pièces du puzzle se mettent en place petit à petit. L’épaisseur des personnages n’est pas donnée d’emblée. Ceci-dit, j’ai trouvé qu’il y avait des longueurs, que certains passages auraient pu être écourtés. Certains interrogatoires m’ont gênée par leur côté un peu caricatural : un inspecteur qui joue « le méchant » et l’autre qui joue « le gentil », et donc l’hypocrite. Au-delà de cela, l’intrigue est fine et il y a un vrai souci de vérité. Que ce soit la vérité faite sur ce crime ou la vérité des personnages dont les actes se trouveront pleinement justifiés. L’incompréhensible peut finalement devenir compréhensible d’une certaine manière.

Tout ce que je suis d'Anna Funder

Quelle histoire poignante ! Au travers des réminiscences d’une femme âgée et des mémoires d’un de ses compères, on suit l’évolution d’un groupe d’amis luttant contre le nazisme dès ses prémices : Toller qui a combattu lors de la guerre 14-18 et Ruth qui est la cousine de la si charismatique Dora. Ce n’est pas encore « officiellement » la guerre, mais pour les opposants d’Hitler, il règne déjà un climat de guerre : après l’incendie du Reichstag, en février 1933, les arrestations se multiplient, les exécutions sommaires aussi. Les opposants sont contraints à l’exil.

On partage leur vie quotidienne, leurs doutes, leurs peurs, leurs joies. C’est un petit groupe solide où règne la solidarité, mais les menaces et la terreur ne sont jamais très loin. C’est quelque chose de suivre ces jeunes gens en résistance. Toller et Dora sont particulièrement charismatiques, sensibles et touchants. Lui parce qu’il a connu la guerre et qu’elle a laissé des traces, elle parce qu’elle donne tout pour la lutte contre le nazisme. Ils sont à la fois forts, « faibles », passionnés et vivent leur vie en suivant de hauts idéaux de lutte et de liberté. Ce culte de la liberté se retrouve aussi dans leur façon de vivre l’amour, libre certes, mais pas si facile à vivre au jour le jour.

C’est vraiment un roman fort où l’on s’attache aux personnages au point de vibrer, de trembler et de pleurer avec eux ; c’est beau et rare de se sentir aussi ému.